Pourquoi le féminisme est-il encore nécessaire en 2016 ?

Bonjour à toutes et à tous !

On y est, 31 décembre 2016, l’année se termine … Et on ne voulait pas vous laisser sans un petit clap de fin à notre manière sur l’année !

2016 a encore été faite d’un quotidien marqué par le sexisme ordinaire, exprimé d’ailleurs par des femmes comme par des hommes. On ne va pas lister ici tous les exemples que nous avons entendu (imaginez la tonne de boulot …)

Mais c’est quand même très tentant de mentionner que pendant l’Euro, des milliers de nanas ont répété que « trop chiant, leur chéri allait être tout le temps devant le foot !!! ».
-Tu sais, rien ne t’interdis de regarder avec lui … Eh oui, le sport à la télé ce n’est pas qu’un truc d’homme et regarder du foot n’entraînera pas une poussée subite d’un pénis entre tes jambes !-

En faisant notre flash-back sur 2016, on s’est en fait demandé :

Pourquoi le féminisme est-il autant d’actualité ?

 

 

Raison n°1 : Les américains ont donné de la légitimité à un véritable misogyne.

Donald Trump, nouveau président des Etats-Unis a en effet scandalisé plus d’un-e en balançant plusieurs tirades sexistes et accessoirement en incitant au viol.
Au mois d’octobre, une vidéo a fuité : on y voit Trump se vantant d’être un prédateur sexuel « Je n’attends même pas. Quand tu es une star, elles te permettent tout. Tu peux tout faire. Les attraper par la chatte ».

C’est choquant. Et ça n’a pas empêché les américains de l’élire président et de faire de lui le leader du monde libre. Preuve que le sexisme a encore bien sa place dans les plus hautes sphères du pouvoir, sans que cela ne pose aucun problème à personne.

Raison n°2 : Les agressions sexuelles n’ont jamais été autant d’actualité.

Lundi 9 mai 2016 : quatre élues écologistes accusent publiquement Denis Baupin de comportements de harcèlement sexuel et d’agression sexuelle.
Il a nié une par une les accusations de harcèlement et agressions sexuelles pour ne reconnaître que des « jeux de séduction » (peut être n’avons-nous tous pas la même définition du mot « séduction » …)
La députée Isabelle Attard quant à elle a évoqué « du harcèlement quasi quotidien de SMS provocateurs, salaces ».

Dans un autre registre, la télévision n’a pas été en reste.
Lors de l’émission les 35h de Baba diffusée le jeudi 13 octobre, la danseuse Soraya Riffy a à plusieurs reprises refusé d’embrasser le chroniqueur Jean-Michel Maire.
Sans aucun respect pour son consentement, celui-ci a quand même déposé sa bouche … Sur sa poitrine. Choqués, plusieurs téléspectateurs ont saisi le CSA.

Au delà de l’agression en elle-même (pour rappel « Constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise. »), ce qui a été consternant a été le traitement que les chroniqueurs de l’émission ont réservé à l’incident.

On a notamment décrété que ce n’était pas une agression : « C’était une boutade faut pas exagérer merde ! » Isabelle Morini-Bosc
Ou encore, on a culpabilisé la victime « J’imagine et je comprends tout à fait qu’une famille soit sensible à ça et tout, mais qu’est-ce qui les a le plus gêné ? » Jean-Luc Lemoine

Quelques semaines plus tard, c’est le présentateur lui-même qui a pris la main d’une chroniqueuse pour l’apposer de force sur ses parties génitales.

Tout cela devant au moins un million de téléspectateurs. De quoi redorer un peu plus l’image de la femme et de quoi déresponsabiliser encore plus les auteurs d’agressions sexuelles.

Raison n°3 : Parce que la place de la femme, dans les débats politiques, c’est pas encore ça.

Marion Maréchal Le Pen, François Fillon … Nombreux ont été les politiques qui ont critiqué le droit à l’avortement.
Mieux encore, selon Marion Maréchal Le Pen, seules les femmes riches devraient pouvoir avorter. Il faudrait « revenir sur le remboursement intégral et illimité de l’avortement ».

Pas assez responsables pour faire le choix d’avorter ? Faire de nous des poules pondeuses systématiques ? Nous recherchons encore la raison de ces discours.

Et encore, faut-il croire que nous avons de la chance en France ? En septembre dernier, c’était la Pologne qui était à deux doigts d’interdire totalement l’IVG.

Mais le sexisme dans les débats politiques ne s’arrête pas là.
Il y a 6 mois était votée une loi majeure qui reconnait enfin que la prostitution est une violence, commise quasi exclusivement par des hommes envers, dans l’immense majorité des cas, des femmes.
Cette loi considère les clients comme responsables de cette violence (ils entretiennent entre autre les réseaux de traite et de proxénétisme). A ce titre, il est devenu interdit d’acheter un rapport sexuel.

Mais tout cela, à quel prix l’avons-nous obtenu ?
Au prix de deux ans et demi de débats et arguments malvenus à l’Assemblée nationale.
Au prix aussi de la publication d’une pétition parue dans le mensuel Causeur, intitulée «Touche pas à ma pute ! Le manifeste des 343 salauds», qui proteste contre ladite loi et réclament « leur droit à une pute ».

Raison n°4 : Parce que le sport est (encore) resté une affaire d’hommes.

L’été 2016 a été fort riche en émotions sportives … Apparemment réservées aux hommes.
L’occasion de voir des discours se rapprochant du « les femmes aux fourneaux et les hommes devant la TV » pendant tout l’été.

Où est-il écrit que le sport à la télé est réservé aux hommes ?

Mieux encore, il faut souligner le traitement qui était réservé aux sportives (qu’on voyait trop rarement à l’écran).
Lorsqu’ils ont parlé des Jeux de Rio, les journalistes, français comme étrangers, ont décroché et de loin la médaille d’or du sexisme.
Si journaux et télévisions parlaient trois fois plus des hommes que des femmes, on peut aussi démontrer qu’on en parle pas toujours de la même manière.

Les sportives sont plus souvent mises en tête d’affiche pour la longueur de leur jupe, les récentes naissances de leurs enfants que pour leurs chances de médailles.

Le journal L’Equipe a en août dernier dressé un portrait de la judoka Automne Pavia où elle était décrite comme « une athlète élancée que l’on pourrait voir ailleurs que sur les tapis de combat ».
La responsable des relations publiques à la Fédération française de judo l’a également décrite comme quelqu’un de « mignonne et atypique car très féminine pour une judoka » (les judoka qui passent par ici, vous devez donc vous tenir à un look très masculin sinon vous ne rentrerez pas dans la bonne case …

Nous avions déjà réagi à ce sujet au moment de l’Euro, en juillet dernier : pour lire ou relire l’article, c’est ici.

Raison n°5 : Parce que le contrôle des tenues féminines était au coeur de la polémique cet été.

Trop long. Trop courte. Trop nue. Trop couverte.
L’été est un supplice pour les femmes, toujours trop ci ou pas assez ça.

Mais c’est à l’été 2016 qu’on a quand même décroché le pompon du sexisme (agrémenté d’un soupçon de xénophobie sinon c’est pas drôle).
Des maires ont carrément pris l’initiative d’interdire le burkini sur les plages de communes littorales.
On a, dans le pays des droits de l’Homme, décidé de réglementer les tenues des femmes. Comme si qui que ce soit pouvait avoir un mot à redire sur les tenues des unes et des autres au nom de l’ordre public.

Pour lire ou relire notre réaction à chaud, ça se passe ici.

Raison n°6 : Parce qu’à Noël, les jouets pour les garçons sont encore bleus et ceux pour les filles sont encore rose.

Tous les mois de décembre, la même rengaine. Les voitures téléguidées pour les petits garçons et les poupons pour les petites filles. Sans oublier évidemment pour celles-ci les kits de parfaite ménagère.
Tout cela listé dans des catalogues où les pages destinées aux garçons sont bleues et celles destinées aux filles sont … Différentes.

Doit-on ranger les enfants, dont la personnalité n’est pas même encore construite, dans des cases aussi étroites ?

Certain-es ce sont quand même essayés à la modernité et à l’ouverture d’esprit comme ce papa d’un petit garçon de 4 ans qui rêvait d’avoir une poupée à Noël, mais qui n’osait pas la demander car « c’est sur les pages rose du catalogue ». Ayant tweeté sur le sujet, il a reçu des tonnes de réponses haineuses telles que « il est pd ton fils » ou encore « ton fils c une pauvre zoulette ».

Les catalogues de jouets de Noël sont un exemple parmi tant d’autres pour prouver à quel point la société influence notre identité de genre. De quoi en perdre notre liberté d’agir en harmonie avec ce qu’on veut vraiment.

Raison n°7 : Parce que culturellement, les femmes sont invisibles.

Dès la primaire, au collège ensuite et enfin au lycée, on étudie la littérature, française notamment.
Flaubert, Balzac, Hugo … Mais Marguerite Duras ? George Sand ? Marguerite Yourcenar ?
Tant de femmes talentueuses voire audacieuses pour leur temps qui ne figurent même pas au programme du Baccalauréat LITTÉRAIRE !!!!

Raison n°8 : Parce que partout dans le monde, c’est un peu cata.

Il y a trois jours, une femme afghane a été décapitée pour avoir fait du shopping sans son mari, dans une province du pays sous contrôle taliban.
Sous le régime taliban, les femmes en effet ne sont pas autorisées à quitter leur domicile sans un homme. Elles ne peuvent pas non plus travailler ou recevoir une quelconque forme d’éducation.

Le 29 novembre, en Arabie-Saoudite, une jeune femme de 20 ans avait posté sur son compte Twitter une photo d’elle, cheveux nus, dans les rues de Riyad. Ayant provoqué l’indignation sur la Toile, elle a attiré l’attention de la police qui est venue l’arrêter à son domicile.

Autant de faits divers qui illustrent que l’égalité est très loin d’être acquise.

 

En fait, si on avait réellement « plus besoin de féminisme en 2016 » (comme on l’entend tous les jours), nous n’aurions pas mis en place le projet des Culotté-e-s en juin dernier.
Si faire ce travail quotidien au service de notre cause est un réel bonheur, nous ne devrions malheureusement même pas avoir à le faire.
Il ne tient qu’à vous (et à nous) tous de nous faire taire et de ne plus donner de raison d’être à cette association.

Nous sommes en fait là car nous croyons dur comme fer que l’égalité deviendra un jour une réalité. Mais c’est évident qu’on a encore du pain sur la planche.

Pour finir l’année 2016, nous tenions aussi à remercier toutes les personnes qui nous ont soutenu et qui nous soutiennent depuis le mois de juin dernier. On fera en sorte de faire encore mieux en 2017 !

Sur ce, on vous souhaite une belle et heureuse année à toutes et à tous !

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Crédit photo : AFP/THOMAS COEX

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